Lorsque
vous lirez ces lignes, vous vous poserez de nombreuses questions sur les
médicaments qui sont censés vous soigner ainsi que votre famille. Je
vous communique deux chiffres sur le taux de contrefaçon des médicaments. Dans
les pays développés il est d’environ 1%, avec des organismes spécialisés qui
luttent en permanence pour la préservation de la santé de leur population. En
Afrique, l’Organisation Mondiale de la Santé estime entre 30% et 70% le taux de
contrefaçon sur les médicaments. Même si ce taux varie selon les pays, il est
plus qu’alarmant. Il donne en outre des sueurs froides, puisqu’en avril 2013,
une opération conjointement menée par l’Organisation mondiale des douanes et
l’Institut de recherche anti-contrefaçon de médicaments (IRCAM) de Paris, a
donné les résultats suivants dans 23 ports africains, sur une période de
dix jours: plus d'un milliard d'articles contrefaits ; plus de 550
millions de doses de médicaments illicites, potentiellement dangereux et
mortels. Plusieurs groupes de produits sont touchés sans que cette liste ne
soit exhaustive : antibiotiques,
anti‐inflammatoires, antidouleurs, antihypertenseurs, antidiabétiques,
compléments alimentaires, etc. En 2010, ce trafic mortel représentait dans le
monde environ 75 milliards de dollar.
Je
vous avais prévenus quant aux nombreuses questions que vous vous poseriez. Je vous
laisse entrevoir, à ce stade de cette tribune, le drame qui se joue au
quotidien dans plusieurs villes africaines.Pour
commencer, certains opérateurs économiques passent commande de ces produits
dangereux, de bonne foi. D’autres passent commande en toute connaissance de
cause. Certaines
autorités effectuent les contrôles avec tout le professionnalisme requis. D’autres,
au contraire, effectuent des contrôles de complaisance, ou n’effectuent pas de
contrôle du tout ; ils ont reçu de l’argent et pour eux, c’est le plus
important. Pour
boucler la boucle, des circuits de distribution écoulent chaque jour ces poisons
dans les veines de nos populations avec pour corollaire d’énormes problèmes de
santé publique.
Ces
populations sont triplement victime d’un commerce que je n’arrive toujours pas
à qualifier :
-
Victimes de n’avoir pas été soignées ;
-
Victimes d’un risque mortel ;
-
Victimes d’avoir acheté et donc alloué leur budget de
santé à des non-médicaments et à
des poisons.
Pendant
que vous lisez cette tribune, des conteneurs de médicaments contrefaits sont toujours
acheminés sur le continent. Des personnes en font leur business, tandis qu’une
grande partie de la population est en train de les utiliser pour se
« soigner ».
Un
extrait du plus ancien ouvrage de médecine chinoise traditionnelle (le Huang di
Nei Jing) indique que « le sage n’attend pas que les hommes soient malades
pour les soigner, il les guide quand ils sont en bonne santé. » Que chacun de
nous soit un sage pour son entourage.