jeudi 16 janvier 2014

Nos Shebabs(*) à nous

Comme des vautours qui rodent et se repaissent des carcasses, ils sont aux aguets, prompts à repérer leur pitance. Chez nous, ils sont à priori comme tout le monde ; ensuite lorsqu’ils repèrent leur carcasse ils revêtent allégrement leurs habits de charognards. En solo ou en meute ils foncent sur leur proie plus que jamais désarmée. 
Oui chez nous, ces charognards nous côtoient, font partie de la famille. Ils peuvent apparaître avec leurs sourires niais et hypocrites lorsqu’ils vivent, comme un pique-bœuf, aux dépens d’un bienfaiteur. Aussi, s’emploient-ils à donner des gages de fidélités, de respect, d’affection…jusqu’à ce qu’un jour ils révèlent leur vrai visage. Un visage laid de Shebabs, un visage ou ce sourire niais et hypocrite laisse la place à un rictus de carnassier. Les Shebabs sont alors en place, dans un macabre ballet de charognards affamés, les yeux rouge-vifs d’envie, de haine et de prédation. Déjà, comme des charognards dans la plaine, ils repèrent les biens du défunt, en font l’inventaire exhaustif, sans état d’âme. Aux abonnés absents depuis bien longtemps du quotidien de celui-ci, ils se font aujourd’hui présents. Ils brandissent une assertion pleine de philosophie et de méchanceté : les morts ne parlent pas ! Oui, même si ces derniers ont laissé un testament. 
La bave à la bouche, ils sont les nouveaux maîtres. Ils spolient les veuves et les orphelins, décident de tout, font des promesses mais appliquent invariablement une razzia sur les biens existants. Après, plus rien, la stratégie de la terre brulée des Shebabs a laissé place aux drames et aux profondes blessures. Ils ont crachés tout leur venin emmagasiné depuis bien longtemps, trainés les veuves et les orphelins devant les tribunaux. Oui dans nos contrées, le vivant n’a pas de valeur, sauf pour ce que nous pouvons lui soutirer. Oui dans nos contrées, le mort a plus de valeur pendant la période des funérailles surtout lorsqu’un héritage est apparent
Pendant que des personnes travaillent chaque jour à la sueur de leur front pour nourrir leur famille et aider une famille bien plus large, nos Shebabs à nous rodent chaque jour, repus ou affamés (c’est selon) et comme la hyène ou le vautour, ricanent ou piaillent en attendant un nouveau festin.
Fort heureusement, les Shebabs n’arrivent pas toujours à s’implanter ou à occuper un « territoire » ; ils sont chassés ou déboutés. Sans pitance à l’horizon, ils errent alors comme des hyènes, la queue rentrée et la tête basse, dans une plaine déserte où la brise chaude et lourde se fait l’écho d’un chant perpétuel.
S’il arrivait qu’un Shebab subisse lui aussi une attaque de ces congénères ce ne serait qu’une ironie du sort. 
(*)Fusion de plusieurs groupes islamistes somaliens liés à Al-Qaïda

Red Tails

Benjamin Olivier Davis est le premier général noir de l’armée de l’air américaine. Il intégra la prestigieuse Académie militaire de West Point en 1932. A cette époque, il vécut la ségrégation  raciale au cours de sa formation. Personne ne lui adressait la parole. Il n’avait pas de camarde de classe. Le « silent treatment » se mit en place pour lui, car il fallait qu’il parte de l’école. Il devait ainsi supporter le regard de toute l’école, manger seul au réfectoire et compter uniquement sur lui-même pendant toute la durée de sa formation (4 ans). Ce traitement eut l’effet inverse car Benjamin fut plus que jamais déterminé à réussir.  
A cette époque, il ne se doutait certainement pas que ce rude parcours initiatique le préparait à une noble mission qui exigerait dépassement de soi et surtout l’obtention obligatoire d’un succès à terme. Cette mission prit tout son sens pendant la seconde guerre mondiale. En effet, pendant cette période, il était institutionnellement reconnu et inscrit dans les documents officiels que les militaires de couleur n’étaient pas aptes à assumer des fonctions supérieures ou nécessitant des aptitudes intellectuelles élevées. Ils étaient donc confinés à être les petites mains de l’armée américaine en s’engageant comme soldats, cuisiniers, mécaniciens, etc. Lorsqu’en 1941, sous la pression des actions anti-ségrégationnistes, une loi permit aux militaires noirs d’aspirer à mieux dans l’armée américaine, l’espoir de servir son pays selon ses mérites naquit dans le cœur de bon nombre d’Afro-Américains. Un programme de formation fut donc ouvert à leur intention à Tuskegee en Alabama. Après leur formation, ils intégrèrent des escadrilles et combattirent en Afrique du nord et en Europe. Aussi, le 332nd Fighter Group placé sous le commandement de Benjamin Olivier Davis devait-il, avant de se battre contre l’ennemi, se battre d’abord contre les préjugés, le racisme et les humiliations : regards des autres, rires narquois, interdiction d’accès au mess des officiers.  
Malgré l’adversité et menés par Benjamin, les Tuskegee Airmen, communément appelés les Red Tails à cause de la couleur de la queue de leurs avions de chasse (le P-51 Mustang), accomplirent leur mission avec bravoure. Ils se taillèrent une solide réputation aussi bien chez les pilotes allemands, qui les redoutaient, que chez les équipages de bombardiers américains qu’ils étaient chargés de protéger. En effet, lorsque les Red Tails assuraient la couverture des groupes de bombardiers, aucun d’eux n’étaient abattu ou tout au moins les pertes étaient minimes. Même si ces équipages d’aviateurs blancs étaient rassurés quand les Red Tails étaient à leurs côtés dans le ciel, ils ne se doutaient pas un seul instant qu’ils devaient la vie à des pilotes de chasse noirs. 
Au cours de la guerre, les Red Tails ont établi un record exceptionnel: ils ont effectué plus de 15.000 sorties ; abattu ou détruit plus de 384 avions ennemis ; détruit plusieurs centaines de véhicules, de chars, de trains, d’embarcations, de bateaux, etc. Ils ont perdu 66 de leurs chasseurs et seulement 25 bombardiers. 
Lorsque le 29 mars 2007 au capitole à Washington, le président George W. Bush décore environ 300 Tuskegee Airmen ou leurs veuves en leur remettant la Médaille d'or du Congrès, il eut ses quelques mots parmi tant d’autres : « Ces héros ici présents ont combattu à l’occasion de deux guerres ; l’une en Europe et l’autre dans le cœur et l’esprit de nos concitoyens». 
Le Président Bill Clinton eut lui aussi ces mots à l’occasion des obsèques du Général Davis: « Il est aujourd'hui la preuve qu'une personne peut surmonter l'adversité et la discrimination, réaliser de grandes choses, transformer des sceptiques en croyants ; et par l'exemple et la persévérance, une personne peut apporter un changement vraiment extraordinaire ».
Le 17 juillet 2002, le Général Davis fut enterré pendant qu’un P-51 Mustang survolait le cimetière d’Arlington en hommage à cet homme d’exception.