lundi 16 avril 2012

Printemps et hiver Arabes


L’hirondelle n’a pas annoncé ce printemps là. C’est bien, Mohamed Bouazizi, un jeune marchand de fruits et légumes qui, en s'immolant par le feu en Tunisie a, par son geste, enflammé le monde arabe.

Ce drame, qui aurait pu passer presque inaperçu, s’est mué en un gigantesque tsunami dont les ondes de chocs ont fait trembler les fondations du monde arabe. En effet, de Tunis à Damas, des monarchies du golfe en passant par le Caire ou Tripoli, un soulèvement populaire s’est mis en marche avec les mêmes cris et les mêmes revendications : la liberté, la démocratie et de meilleures conditions de vie. Ce mouvement systémique, qualifié de « printemps arabe », même s’il partage le même épicentre a connu des formes et fortunes diverses : chute de Ben Ali et de Moubarak, mort de Kadhafi, réformes au Maroc, situation toujours dramatique en Syrie…

S’il est vrai que le printemps apporte douceur et renaissance de la nature, il n’en demeure pas moins que cette saison laisse place à l’automne puis à l’hiver. Passé les hourras et les youyous des femmes, qui annonçaient la délivrance du peuple, est apparu insidieusement l’automne. Aussi, les feuilles du dattier se sont-elles flétries, laissant la place à un paysage moins reluisant. Déjà, des courants islamistes, qui couvaient sous le boisseau, sont apparus dans certains de ces pays ; les interrogations également : les nouveaux leaders islamistes sont-ils de bonne foi lorsqu’ils donnent des gages de démocratie à la communauté internationale ? Les populations ne se retrouveront-elles pas prisonnières de leur propre révolution ?

J’ose espérer que cette période cruciale pour le monde arabe, en ouvrant la porte à la liberté par le « printemps arabe » n’a pas également ouvert une boîte de pandore qu’il sera difficile de refermer.

Victor Hugo nous souffle en effet à l’oreille cette maxime : « Les révolutions ont un besoin de liberté, c’est leur but, et un besoin d’autorité, c’est leur moyen. La convulsion étant donnée, l’autorité peut aller jusqu’à la dictature et la liberté jusqu’à l’anarchie. »

Le vrai sacrifice est celui qui produit des beaux et bons fruits. Quels seront les fruits de celui de Mohamed Bouazizi pour que le « printemps arabe » ne se transforme pas en « hiver arabe »?